Description détaillée
Cette illustration représente une scène
pastorale. L’on y voit des champs, des maisons avec des toits en ardoise rouge,
et un moulin à vent. Sous le dessin figure un texte en Yiddish.
Ce paysage a été utilisé comme décor dans
une pièce de théâtre jouée par des enfants, dans un dortoir situé dans le
Ghetto de Vilnius. L’on ignore si cette bâtisse située au 4 rue Strashun était
un orphelinat, une école, ou bien un autre établissement pour enfants. À côté
de ce bâtiment, au 6 rue Strashun, se trouvaient une bibliothèque et une école
juives très connues.
Dans le ghetto de Vilnius, les Juifs,
comme dans d’autres ghettos en Europe sous domination nazie, s’engagèrent dans
de nombreuses activités culturelles comme le théâtre, la musique, l’art et la
littérature. Ces performances artistiques étaient grandement appréciées de
tous, tant des artistes que de leur public. Elles constituaient une sorte de
résistance spirituelle contre les nazis, tout en permettant aux gens d’oublier
les difficultés de la vie quotidienne. Cette pièce de théâtre jouée par des
enfants offrait sans doute à ces derniers un exutoire artistique estompant
quelque peu la cruelle réalité du ghetto. Le paysage dessiné ici exprime
peut-être les rêves de ces enfants ; ces champs et ce ciel ensoleillé ne reflétaient
certainement pas leur triste horizon et leurs sinistres conditions de vie. La
pièce de théâtre « Une bougie de ‘Hanouka en moins » a été
montée par des enfants vivant dans un foyer. Ils étaient probablement
orphelins, ou leurs parents ne pouvaient prendre soin d’eux dans les terribles
conditions du ghetto.
Ce document a fait un voyage fascinant
depuis les forêts de Lituanie jusqu’à Moscou, pour arriver finalement à la
Bibliothèque Nationale d’Israël. Abraham Sutzkever, écrivain et poète yiddish,
réussit à s’échapper du ghetto de Vilnius en emportant avec lui de nombreux
objets du ghetto. Il rejoignit les Partisans, et le Comité juif antifasciste
d’Union soviétique réussit à convaincre les autorités soviétiques de l’envoyer
à Moscou en avion. Le premier avion qui devait le ramener fut abattu par les
nazis, et Sutzkever fabriqua une valise à partir des fragments de l’appareil.
La deuxième tentative fut couronnée de succès, et Sutzkever s’envola pour
Moscou avec sa valise remplie de ses écrits, et de souvenirs de guerre du Ghetto
de Vilnius. Parmi les nombreux documents présents dans
sa valise, il y avait cette image représentant le décor de la pièce de théâtre
de ‘Hanouka. Sutzkever émigra finalement en Israël en 1947, et pour mettre sa
valise et son contenu en lieu sûr, il décida d’en faire don à la Bibliothèque
Nationale d’Israël.
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en savoir davantage ?
‘Hanouka – la
fête de ‘Hanouka célèbre la ré-inauguration du Temple par Judas Maccabée et
son armée après leur victoire sur les Grecs, en l’année 165 avant notre
ère. L’un des miracles bien connus de l’histoire de Hanoucca est la petite
fiole d’huile grâce à laquelle la Ménorah du Temple fut allumée et brûla pendant
huit jours. ‘Hanouka commence le 25 Kislev, et l’on célèbre cette fête en
allumant la ‘Hanoukia pendant huit soirs d’affilée. La coutume
consiste à manger des aliments frits (en souvenir de l’huile), et à jouer avec
des toupies appelées dreidles.
Le ghetto -
Le premier ghetto fut créé à Venise en 1516. Ce nom provient du terme « getto »,
« la fonderie » qui fut découverte près de l’emplacement du quartier
juif de Venise. Depuis cette époque, le mot « ghetto » est
utilisé pour décrire la partie séparée de la ville où les Juifs étaient contraints
de vivre, et de laquelle on les empêchait souvent de partir. La plupart
des ghettos juifs étaient surpeuplés, et les gens y vivaient dans des
conditions très difficiles. De nombreux ghettos étaient entourés de murs fermés
de l’intérieur. Ces murs protégeaient la communauté pendant les pogroms, mais
ils servaient également à empêcher les Juifs d’accéder aux quartiers chrétiens
à certaines heures. Parmi les ghettos et quartiers juifs célèbres (ou
tristement célèbres), l’on peut citer Josefov à Prague, le Marais à
Paris, Jodenbreestraat à Amsterdam, Kazimierz à Cracovie,
et Judengasse à Francfort. Au XIXe siècle, les ghettos juifs furent
progressivement supprimés, et leurs murs abattus. Au
XXe siècle, le mot « ghetto » fut utilisé pour décrire les
zones dans lesquelles les nazis parquèrent les Juifs pendant la Seconde Guerre
mondiale. Ces ghettos du XXe siècle étaient en réalité des prisons, et beaucoup
y moururent de faim et de maladie en raison des conditions de vie
abominables. Les ghettos constituaient une simple étape dans le processus de la
Solution Finale : il s’agissait en effet de l’endroit où les Juifs étaient
regroupés avant d’être déportés dans les camps de la mort.
L’Holocauste - l’Holocauste,
également appelé « la Shoah », fut le génocide et la persécution des
Juifs d’Europe pendant la Seconde Guerre mondiale, menés par le régime allemand
nazi et ses collaborateurs en Europe et en Afrique du Nord. La Shoah fut
mise en œuvre par étapes progressives. Tout d’abord, Adolf Hitler et le parti
nazi accédèrent au pouvoir. À partir de 1933, l’Allemagne statua des
lois anti-juives excluant les Juifs de la société allemande. Les nazis
commencèrent à créer un réseau de camps de concentration, où les Juifs et les autres
« éléments indésirables » de la société furent emprisonnés dans des conditions
inhumaines. Lorsque les nazis envahirent l’Europe pendant la Seconde
Guerre mondiale, tous les pays occupés mirent en œuvre une persécution
officielle des Juifs. Ces derniers furent parqués dans des ghettos, envoyés
aux travaux forcés, et vécurent dans des conditions
épouvantables. En 1942, les nazis organisèrent la Conférence
de Wannsee. Ils y mirent au point la Solution Finale qui prévoyait dans
les moindres détails l’extermination de tous les Juifs d’Europe. Dans un
premier temps, plus d’un million de Juifs furent assassinés par des escadrons
de la mort nommés « les Einsatzgruppen », qui étaient assistés par
des collaborateurs locaux. À partir de 1942, les Juifs furent déportés
vers les camps de la mort en Pologne, notamment à Auschwitz- Birkenau, Majdanek,
Chelmno, Belzec, Sobibor et Treblinka, où dès leur arrivée, des
millions d’entre eux furent assassinés dans les chambres à gaz. Les Juifs
qui ne furent pas immédiatement assassinés furent envoyés aux travaux forcés,
et beaucoup moururent de faim et de maladie. Les Juifs eurent énormément de
difficultés à mettre en place une résistance, mais des Partisans et des
combattants juifs réussirent à affronter les nazis, notamment lors du célèbre
soulèvement du ghetto de Varsovie et du ghetto de Sobibor. En 1944,
alors que la défaite des nazis semblait inévitable, ces derniers commencèrent à
évacuer les camps, et forcèrent les survivants à marcher vers
l’Allemagne. Déjà malades et affaiblis par des années de violence, plus de
250 000 Juifs moururent pendant ces marches de la mort. La Shoah prit
fin avec la défaite des nazis en mai 1945. Six millions de Juifs, soit
deux tiers de la population juive d’Europe, furent assassinés, tandis que des
millions d’autres endurèrent d’abominables souffrances et subirent de terribles
pertes. Outre les Juifs, des millions de Tziganes (gitans), d’homosexuels,
de Témoins de Jéhovah, de personnes handicapées, et de prisonniers de guerre
soviétiques et polonais, furent également assassinés pendant la Shoah.
Le yiddish -
Le yiddish est une langue juive ancienne, née dans les
communautés ashkénazes au IXe siècle. Il est basé sur un mélange d’allemand,
d’hébreu et d’araméen, et s’écrit en lettres hébraïques ou latines. Le
yiddish était la langue communément parlée dans les communautés juives
ashkénazes. Il était utilisé dans un contexte à la fois religieux et laïque en
Europe, puis plus tard, aux États-Unis. Une grande partie de la
littérature juive célèbre d’Europe de l’Est et des États-Unis a été écrite en
yiddish par des écrivains tels que Shalom Alekhem, I.L. Peretz et
Isaac Bashevis Singer (qui reçut le prix Nobel de littérature en
1978). Le désir de s’intégrer dans la société, et la quasi-disparition de
la communauté juive européenne pendant la Shoah ont entraîné une forte diminution
du nombre de yiddishisants. Aujourd’hui, cette langue ne se parle quasiment
plus que dans les communautés ultra-orthodoxes.
Les Juifs
de Vilnius, en Lituanie – en 1593, les Juifs furent officiellement
autorisés à vivre à Vilnius, capitale de la Lituanie. Au milieu du XVIIe
siècle, les Juifs représentaient un quart de la population de la
ville. Cependant, après l’occupation de la ville par la Russie en 1655, la
population juive diminua. La vie juive continua néanmoins, malgré les
pogroms et les accusations de meurtres rituels. Au début du XVIIe siècle, la
ville commença à devenir un centre d’études de la Torah. Cet essor spirituel
connut son apogée au XVIIIe siècle avec le Gaon de Vilna qui fonda
le mouvement des Mitnagdim, en opposition au mouvement ‘Hassidique. Au
XIXe siècle, la ville comptait des communautés ‘Hassidiques, des communautés de
Mitnagdim, et des membres de la Haskalah (mouvement juif
laïque, influencé par le mouvement des Lumières). De nombreuses écoles, yéchivot,
et associations culturelles et politiques furent créées à ce moment-là. Vilnius
devint également un lieu central pour le monde de l’édition avec l’apparition des
premières revues juives imprimées en hébreu. La vie juive était tellement
intense à Vilnius, que cette dernière fut surnommée la « Jérusalem de Lituanie ». À
la fin du XIXe siècle, de nombreux Juifs quittèrent Vilnius pour s’installer aux
États-Unis et ailleurs. Au XXe siècle, de plus en plus de Juifs partirent
pour la Palestine, en raison du mouvement sioniste très actif de la
ville. Lorsque les nazis envahirent Vilnius en juin 1941, la population
juive comptait environ 60 000 personnes. Environ 20 000 Juifs furent tués
au cours des deux premiers mois. Le ghetto de Vilnius fut créé en
août 1941. Un fort mouvement de résistance naquit dans le ghetto, et un certain
nombre d’opérations furent menées avec succès contre la domination
nazie. La plupart des Juifs de Vilnius furent tués par balle dans la forêt
de Ponar ou déportés dans les camps, mais certains survécurent en s’échappant
dans les forêts et en rejoignant les Partisans. Après la Seconde Guerre
mondiale, environ 16 000 Juifs vivaient à Vilnius, mais sous la domination
soviétique, il n’y avait pas de communauté organisée. La Lituanie est
devenue indépendante en 1990. L’on estime que la majorité de la communauté
juive lituanienne, composée d’environ 2000 personnes, vit à Vilnius. Il y a
dans la communauté deux écoles juives en activité.
Suggestions pédagogiques
Matières scolaires
- Culture et patrimoine juifs
Lecture entre les lignes
- Il s'agit d'une image représentant un décor de pièce de théâtre. Cette pièce a été jouée par des enfants à 'Hanouka, en 1942, dans le ghetto de Vilnius.
- Dans quel pays se trouve Vilnius ? Localisez cette ville sur une carte.
- Que se passait-il à Vilnius, et en Europe en général, au moment où cette pièce fut jouée ?
- Saviez-vous que les enfants jouaient des pièces de théâtre, lorsqu'ils vivaient dans le ghetto ?
- Qu'est-ce que cela nous apprend sur la vie dans le ghetto?
Pensez-vous qu'il était important que ce genre d'événements culturels ait lieu dans le ghetto ? Pourquoi?
Pour plus d'informations, regardez cette vidéo.
- La pièce s'intitulait « Une bougie de 'Hanouka en moins ».
Selon vous, de quoi parlait la pièce ?
- Le texte figurant sur cette illustration est en yiddish.
Que pouvons-nous en déduire sur la vie juive à Vilnius, à cette époque ?
- Nous savons que cette image est une petite reproduction du décor utilisé dans la pièce de théâtre, et comporte des informations la concernant.
À quelle fin cette image a-t-elle pu être utilisée ? (Par exemple, pour une invitation, ou en tant qu'affiche.)
- Quel public a pu assister à cette pièce ?
Selon vous, quelle a été sa réaction ? À votre avis, que les enfants ont-ils ressenti pendant qu'ils jouaient cette pièce ?
- La pièce a été jouée dans un dortoir pour enfants.
D'après ce que vous savez de la vie dans le ghetto, à quoi, selon vous, servait ce dortoir ?
- D'après vos connaissances sur les Juifs de Vilnius pendant la Seconde Guerre mondiale, qu'est-il arrivé, à votre avis, à l'enfant qui a peint ce tableau, et aux enfants qui ont joué dans cette pièce ?
- Cette image a été préservée, car Abraham Sutzkever l'a prise avec lui lorsqu'il s'est échappé du ghetto. Sutzkever a également emporté un certain nombre d'autres documents.
Selon vous, pourquoi a-t-il choisi de garder un souvenir comme celui-ci ?
Pourquoi était-il si important pour lui ?